“Une gamme de plantes de pépinière qui reprennent toujours !”
Bruno Imbert et son fi ls Julien, pépiniéristes à Anse (69), développent une gamme de végétaux composée d'essences particulièrement adaptées aux conditions extrêmes de sol et de climat. Elle est sélectionnée pour permettre aux prescripteurs et aux entrepreneurs du paysage de garantir la pérennité de leurs projets.
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Le concept que les pépinières Imbert lanceront à l'automne, et dont le nom doit encore être validé, définit une liste de végétaux, arbres, arbustes ou conifères, dont la résistance aux conditions extrêmes de sol et de climat a été validée scientifiquement, et qui sont adaptés à toutes les situations. Ce sont des essences particulièrement aptes aux conditions urbaines, économes en eau et endurantes face aux différentes agressions. Outre cette sélection rigoureuse des espèces, la rusticité de ces végétaux est aussi favorisée par les conditions de culture imposées en pépinière. Ces techniques sont basées sur un travail mécanique du sol, la mycorhization systématique des jeunes arbres, une fertilisation uniquement organique, des transplantations régulières, une irrigation naturelle et une orientation géographique de l'arbre toujours identique pour prévenir les échaudures.
Le concept, imaginé il y a une dizaine d'années par Bruno Imbert, directeur des pépinières, est né d'un constat : beaucoup de plantations urbaines sont des échecs. Ceux-ci peuvent être la conséquence de techniques de plantation inappropriées, comme des fosses trop étroites, un mélange terreux inadapté, un sol compacté et biologiquement mort, un mauvais drainage... Mais ils peuvent aussi être causés par une erreur au niveau du choix des végétaux : espèces non adaptées au climat, au sol en place ou aux conditions particulières de chaleur et de sécheresse en ambiance urbaine, un développement adulte non adapté à l'échelle de l'aménagement, espèces sensibles aux attaques parasitaires... Pour Bruno Imbert, « sur cette seconde cause, le pépiniériste a effectivement un rôle à jouer en proposant une gamme de plantes résistantes à toutes ces situations, garantissant qu'en cas de périodes très froides ou chaudes ou de sécheresses prolongées, la survie des végétaux ne soit pas mise en cause. L'adaptation au sol comme la résistance au calcaire est aussi un critère important, particulièrement pour les plantations le long des autoroutes, les talus étant souvent stabilisés à la chaux ». Mais il précise que « la démarche s'avère aussi mercantile, le but étant de nous démarquer de la forte concurrence étrangère que subit actuellement le marché des arbres tiges. Nos concurrents européens (Allemagne, Pays- Bas, République tchèque) n'ont pas les mêmes contraintes économiques que nous, notamment en ce qui concerne les salaires et l'imposition des stocks, aussi nous devons proposer un produit et un service différent ».
La nouvelle gamme a été élaborée à partir de critères de sélection rigoureux : résistance au froid, adaptation à différents types de sol, tolérance aux sécheresses prolongées, tolérance aux sels (sels de déneigement, embruns), adaptation à toutes les expositions, résistance aux maladies et aux attaques parasitaires. En déclinant un à un ces différents paramètres, on peut définir les végétaux les plus adaptés au milieu urbain et garantir une utilisation optimale. À partir de cette présélection, et en concertation avec le prescripteur, le pépiniériste peut ainsi proposer une gamme végétale adaptée aux spécificités de chaque chantier. Si certaines espèces connues répondent tout à fait à ces critères, le but est avant tout d'élargir la gamme en recherchant de nouvelles espèces qui peuvent résister à ces conditions extrêmes. « Nos voyages en France et à l'étranger sont l'occasion de découvrir et d'observer un certain nombre de végétaux au sein des arboretums, pépinières botaniques, ou chez des confrères pépiniéristes », explique Julien Imbert, ingénieur horticole, responsable développement et commercial export. « Pour certains arbres ainsi 'repérés', le premier travail est d'identifier précisément l'espèce, avec l'aide de botanistes. Il convient ensuite de vérifier la rusticité. Celle-ci est le premier critère pris en compte pour définir notre gamme de végétaux pour les conditions extrêmes. La région d'origine de l'espèce donne déjà une première indication quant à la robustesse. Nous travaillons à partir des cartes établies par le département de l'agriculture des États-Unis qui définissent des zones de rusticité (USDA). Ces dernières sont des zones géographiques dans lesquelles une catégorie spécifique de plantes est capable de vivre, de supporter les températures minimales moyennes établies sur les vingt dernières années. On vise les zones les plus froides, essentiellement en Amérique du Nord : Canada, USA et Europe, avec les steppes de Russie, l'Ukraine, jusqu'à la zone himalayenne. Par exemple, la région d'origine du Tilia americana ' Sentry' est répertoriée en zone 3, c'est dire qu'il supporte des températures minimales moyennes jusqu'à - 40 °C. Ce type de carte a par contre l'inconvénient de ne pas tenir compte des températures estivales, ni du taux d'humidité qui est la plupart du temps déterminant quant à la résistance au gel. Aussi, pour vérifier et valider ces données, nous nous appuyons sur les techniciens du Ratho qui travaillent à partir de données bibliographiques. »
Toutes ces données sont, dans un second temps, vérifiées au travers de la mise en culture. Les pépinières Imbert, situées à vingt kilomètres au nord de Lyon, subissent un climat de type semi-continental avec influences océaniques et méditerranéennes : étés chauds et ensoleillés, hivers rigoureux, apte à produire des végétaux adaptés à toutes les zones climatiques de France. Une première liste de plantes a ainsi été établie : uniquement des arbres feuillus dans un premier temps (plus de trente-cinq espèces), progressivement étendue aux conifères (quatorze espèces de pins). On y trouve quelques taxons courants, Paulownia tomentosa, Acer monspessulanum, Quercus frainetto..., d'autres qu'on rencontre plus rarement dans les pépinières européennes (Celtis occidentalis, Liquidambar acalycina), et certains qui sont quasiment exclusifs comme Pinus banksiana ou Liquidambar formosana 'Monticola'. Certains sont destinés aux grands espaces : Acer velutinum qui peut atteindre 25 mètres de hauteur, d'autres aux zones plus réduites, comme Acer hyrcanum, qui ne dépasse pas 10 à 12 mètres. Certains genres a priori trop sensibles aux attaques parasitaires, comme les Prunus, ont dans un premier temps été évincés de la gamme.
Des conditions de culture strictes. Située dans une plaine alluviale créée par la Saône et la rivière Azergue, la pépinière bénéficie de sols argilo-limoneux très fertiles, permettant de produire un excellent système racinaire, et facilement irrigués par les nappes phréatiques formées par les cours d'eaux voisins. Le travail mécanique du sol est la base des opérations culturales. Il permet de favoriser l'infiltration de l'eau (mais aucune irrigation artificielle n'est pratiquée), de lutter contre les adventices sans utiliser d'herbicides chimiques et de faciliter la fertilisation organique et la mycorhization.
« La mycorhization artificielle est une technique employée en foresterie. Elle ne se substitue pas à la mycorhization naturelle mais elle accélère son effet », indique Julien Imbert. « Cet apport est pratiqué une fois par an, au début du mois de juin, sur l'ensemble de nos parcelles de pleine terre quand le premier binage mécanique est effectué. Les arbres sont mycorhizés à l'aide d'un semoir prévu à cet effet, avec une souche de Trichoderma et des endomycorhizes. Les mycorhizes jouent de nombreux rôles : elles facilitent, entre autres, l'assimilation par les arbres de certains éléments minéraux, l'absorption de l'eau, et augmentent la résistance sanitaire. »
L'arrêt des herbicides chimiques a marqué un tournant sur les méthodes de culture. Le pépiniériste constate, depuis, une plus forte vitalité des arbres due, probablement, à la diminution progressive de la toxicité accumulée dans le sol par des années de désherbages chimiques, mais aussi aux avantages liés au travail mécanique du sol (cinq à six passages par an à partir du mois de mai) : meilleure absorption de l'eau de pluie et enfouissement de matière organique fraîche lors des binages de printemps.
Dès leur première plantation en pleine terre, les jeunes tiges sont marquées, côté soleil couchant (sud-ouest), par un ou plusieurs traits de peinture. Ces marques de couleurs différentes permettent à la fois d'identifier rapidement l'espèce ou la variété et de conserver l'orientation du plant lors des prochaines transplantations et jusqu'à son emplacement définitif. « Ces techniques, appliquées à l'ensemble de la production, n'ont rien de révolutionnaires », précise Bruno Imbert. « La mycorhization mise à part, nous sommes simplement revenus à des méthodes de travail que pratiquait mon grand-père. Déjà, à l'époque, il prenait garde à toujours orienter les arbres du même côté. Ces méthodes nous permettent de garantir sur les chantiers des reprises proches de 100 %. Par exemple, sur cent cinquante arbres vendus récemment en région parisienne, seuls deux n'ont pas repris. »
Les premiers végétaux certifiés seront disponibles à la vente à partir de cet automne (la marque a été déposée le 28 mai dernier). La commercialisation s'effectuera de façon classique, sur le stock de production, ou de façon contractuelle. « En travaillant très en amont et en établissant des contrats de culture, on peut garantir au prescripteur la disponibilité des végétaux suivant les espèces et les tailles qui ont été choisies », précise Julien Imbert. « Pour un projet autoroutier, nous venons de signer un contrat de culture de trois ans portant sur 40 000 arbres tiges et baliveaux, jusqu'à une taille de 16/18 »...
Claude Thiery
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